Premières lignes… #240

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Nouveau dimanche, nouvelle découverte ! Je continue le rendez-vous que j’ai trouvé chez Book & share, et inauguré par le blog Ma Lecturothèque 🙂 Le principe de ce post est de prendre un livre chaque semaine pour vous en citer les premières lignes.

Une silhouette se laissa glisser le long du mur, telle une ombre mouvante parmi les ténèbres de la nuit. Ses pas couraient sur les pavés, à peine plus audibles qu’un souffle. Les sens en alerte, l’inconnu se dissimula dans le renfoncement d’une porte et tendit l’oreille. Il régnait un silence oppressant, presque une menace… Nul ne pouvait échapper à la milice. Quelques part dans la capitale, des pantins en uniforme gris arpentaient les ruelles, leurs bottes cirées frappant le sol en un rythme incessant. Violer le couvre-feu était passible de mort et pourtant, une poignée d’audacieux n’hésitait pas à défier le régime.
Avec précaution, l’être au manteau noir se risqua hors de sa cachette et escalada la devanture d’une maison de couture. Ses mains trouvaient naturellement leurs prises, usant du moindre rebord et des anfractuosités de la pierre pour se hisser jusqu’au toit. Sur la pancarte soigneusement astiquée, ses chaussures laissèrent l’empreinte d’une semelle sale, mais être suspecté de vandalisme n’était peut-être que la dernière accusation d’une très longue liste.
Reprenant son souffle, la silhouette rejeta en arrière son capuchon. Ses cheveux courts tombaient sur son front en mèches rebelles. La moitié de son visage disparaissait sous un masque où, à travers deux fentes, des yeux bleu azur contemplaient l’immensité du ciel. En l’examinant de plus près, un détail aurait frappé un observateur extérieur : l’étonnant contraste entre la douceur de ses traits et son apparence masculine. Sous ces vêtements d’homme se dissimulait en réalité une jeune fille à peine sortie de l’adolescence.
– Désolée, Frédérion, murmura Plume, mais vote boutique était la plus facile à escalader.
C’était l’envie de vivre sans contraintes qui lui avait inspiré son surnom. Elle se remémorait souvent ce soir d’hiver où, blottie contre sa fenêtre, elle avait aperçu une plume minuscule virevolter dans le vent. Elle paraissait si légère, flottant dans les airs comme si elle ne voulait jamais redescendre. Plume savait que ces folles excursions ne dureraient pas éternellement. La milice avait ses espions aux quatre coins de la ville. Chaque nuit où elle regagnait la sécurité de sa chambre ne faisait que reculer l’inéluctable. Quotidiennement, des hommes et des femmes étaient traînés de force dans les prisons du palais. Tôt ou tard, elle finirait par les rejoindre, eux, les oubliés de la société, à moins que cela ne soit une exécution pure et simple. Dans les ruelles, il n’était pas rare d’apercevoir des tâches rougeâtres ; du sang qui, même des semaines plus tard, continuait de marquer le sol par son souvenir.

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