Bien le bonjour bande de gens, j’espère que vous allez bien ! On va très prochainement entrer dans la période estivale, oui parce que pour moi l’été c’est quand il fait plus de 25°C, ni plus ni moins. Après, je me dis qu’à Lyon, la ville où il fait très chaud en été, et au septième étage de notre immeuble, l’été risque d’être périlleux pour moi et mon copain ^^’
Nouvelle chronique littéraire ! Je continue à vous proposer des chroniques de romans gothiques du début du XIXème siècle, j’espère que vous êtes chauds ! Le roman dont je vais vous parler aujourd’hui m’a été très utile pour mon mémoire, il faut dire qu’il est assez particulier : je travaille sur les romans gothiques féminins, qui parlent beaucoup de la condition féminine déplorable de l’époque, mais ce roman sort du lot car il est assez sanglant et présente pour une fois une héroïne pas vertueuse et innocente pour un sou. Il s’agit du roman Zofloya, ou le Maure, publié en 1806 par Charlotte Dacre (sous le pseudo de Rosa Matilda). Le roman se passe au XVIème siècle dans la région de Venise, que le roman présente comme un endroit plein de vices et de passions coupables. Navrée si la couverture vous paraît un peu floue, elle représente l’auteure et c’est la seule que j’ai pu trouver en qualité pas trop mauvaise ! Si vous souhaitez le lire, personnellement je l’ai trouvé en trois volumes sur Google Books, mais il est un peu plus connu que les autres romans gothiques dont je vous ai déjà parlés, alors vous pouvez essayer de le commander sur Internet ou en librairie… par contre ce sera probablement plus facile de le trouver en langue originale, en anglais.
Résumé : Lorsque la mère de la jeune Victoria cède à sa passion pour son amant le comte Ardolphe et quitte le domicile conjugal, la famille se déchire. Le fils, Léonardo, s’enfuit pour échapper à la honte qui a éclaboussé son nom. Le père meurt de chagrin, et Zofloya se retrouve seule ; élevée par des parents faibles qui cédaient au moindre de ses caprices, elle entend bien vivre à sa façon, et ce peu importe le moyen. Après s’être enfuie de la maison de la vieille bigote chez qui sa mère l’a placée, elle séduit le vertueux et candide Berenza pour acquérir un statut social. Mais la vertu n’est pas faite pour son âme enflammée, et la belle s’ennuie jusqu’à ce qu’elle croise le chemin du beau Henriquez, et de l’étrange serviteur Maure Zofloya, qui semble prêt à tout pour favoriser ses desseins malveillants.
Mon avis :
Pour vous expliquer en quoi ce roman est particulier, je dois d’abord vous faire un rapide topo sur les romans gothiques féminins : le scénario typique et qu’on retrouve presque à chaque fois, c’est une jeune fille sans fortune et sans nom qui a perdu ses parents et/ou surtout sa mère ; elle se fait enfermer par un méchant homme qui veut l’épouser contre son gré, mais la découverte d’un testament ou autre papier secret la restitue dans son droit. Elle peut alors épouser le vrai élu de son coeur. Ca c’est le scénario de base d’un roman gothique : dans le romans gothiques masculins, l’héroïne est juste là pour faire joli dans le scénario ; dans les romans gothiques féminins, elle met en valeur la critique du patriarcat, et tend à être un poil plus active en résistant à sa façon au méchant. On est encore très loin d’une revendication féministe, mais au moins on a une volonté d’affirmation de la part des femmes, ce qui n’est pas rien pour l’époque, en tout cas c’est ce que j’essaie de montrer dans mon mémoire 😛
Zofloya est très particulier parce qu’il va à l’opposé du schéma : Victoria est une héroïne méchante, qui aspire à l’autonomie et à la satisfaction de ses désirs quels qu’ils soient, quitte à profiter des autres. Pour une fois, on a une héroïne qui lutte pied à pied avec les hommes ; d’ailleurs, elle se « masculinise » peu à peu au cours du roman (parce que si une femme cherche à être autonome, elle va à l’encontre de son sexe, c’est bien connu…). Son personnage est situé complètement à l’opposé de celui de Lilla, un autre personnage du roman : Lilla est l’archétype de l’héroïne gothique, gentille, vertueuse et soumise. Victoria la déteste surtout parce qu’elle est ce que recherchent les hommes, mais aussi parce qu’elle est creuse et sans réelle personnalité. Après, on ne peut pas non plus dire que le roman célèbre le personnage de Victoria : peu importe le roman gothique, les méchants sont toujours punis.
Bref, outre ce personnage déjà très spécial, Zofloya est un roman assez sympa à lire : moins ennuyeux que d’autres, il est plein de rebondissements, et il est assez violent et sanglant pour un roman gothique écrit par une femme (la violence littéraire était surtout l’apanage des hommes à l’époque). Les aventures de Victoria sont fascinantes à suivre, le personnage est à la fois antipathique et impossible à lâcher ! Mais surtout, surtout, c’est le personnage de Zofloya qui intrigue : machiavélique et séducteur, il est particulièrement intéressant :3 Je ne peux pas trop vous en dire sous peine de spoil, mais il vaut le coup d’oeil. Le personnage de Léonardo est au moins aussi torturé que sa soeur, même s’il est moins flamboyant qu’elle ; on peut dire que c’est l’un des rares personnages à être assez nuancé entre le bien et le mal.
Je ne saurai pas trop quoi vous dire d’autre, j’ai passé tellement de temps à l’étudier que j’ai vraiment peur de vous dévoiler l’intrigue, ce qui serait bien dommage ! L’auteure au début du livre semble vouloir présenter son oeuvre comme une étude des comportements passionnés des Italiens, en particulier des Vénitiens ; ça semble un peu tiré par les cheveux, mais ça me fait beaucoup penser à la méthode d’Emile Zola qui voulait étudier l’hérédité dans sa série familiale des Rougon-Macquart. Mais pour éviter trop de blabla littéraire, Charlotte Dacre a surtout écrit son livre comme un pendant féminin au roman plus connu de Matthew Gregory Lewis, Le Moine (que je vous conseille absolument !). Bref, Zofloya est peu connu et surtout en France, mais il vaut le coup d’oeil 🙂
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